
Ce sujet est souvent évoqué sur différents forums d’astrophotographie pour amateurs mais on n’y trouve pas beaucoup de solutions concrètes, aussi je pense utile de partager la méthode que j’ai élaborée au fil du temps, ayant évidemment été confronté à ce problème.
Lorsque l’on débute en astrophotographie, on découvre assez rapidement que les images s’accumulent et qu’il devient important de pouvoir les répertorier. En effet, ce sont des centaines de fichiers à organiser en fonction de leur type, de leur date, de l’instrument, de la caméra CCD ou CMOS, etc. Autant y réfléchir à l’avance pour s’épargner une réorganisation fastidieuse de cette masse de données par la suite; c’est d’autant plus nécessaire que les types d’images sont dépendants les uns des autres.
Par ailleurs, les logiciels de capture proposent chacun un schéma de nommage des fichiers correspondant à chaque image capturée par la caméra. Mon conseil à ce niveau est de définir un schéma contenant les informations les plus complètes possibles, et particulièrement d’enregistrer la date et heure de création du fichier dans le nom du fichier lui-même. Cela permet de ne pas être tributaire des attributs de dates/heures du système d’exploitation, et survit bien quand les fichiers sont déplacés d’un support de stockage vers un autre.
Une fois tous ces fichiers enregistrés, comment les organiser pour s’y retrouver dans une semaine, un mois ou un an?
Types d’images à organiser
Rappelons les types d’images que nous devons gérer :
- Les BIAS : appelés aussi “offset”, servent à étalonner le capteur CCD ou CMOS. Il faut en prendre plusieurs, jusqu’à une centaine, pour créer un MasterBIAS. Ce dernier est à créer une fois pour toutes, et sera utilisé pour étalonner les DARKs et les FLATs
- Les DARKS : ils permettent aussi d’étalonner les images des objets capturés, et sont intimement liés à la réponse du capteur à la lumière dans les conditions de prise de vue. On en prend plusieurs, de l’ordre d’une trentaine, pour fabriquer un MasterDARK. Les darks doivent être créés pour une température donnée et un temps de pose donnée. Il est possible d’utiliser un MasterDARK d’une température plus élevée pour étalonner des images prises à cette température, en interpolant le MasterDARK, mais ce n’est pas l’approche recommandée. La réponse des capteurs évolue au fil du temps, des pixels morts apparaissent progressivement, aussi la durée de vie d’utilisation des MasterDARKS est de l’ordre de 6 mois, durée au-delà de laquelle il faut recréer de nouveaux darks. Ce qui signifie que les images capturées pendant une période donnée doivent être étalonnées avec le MasterDARK correspondant.
- Les FLATS : aussi appelés “plage de lumière uniforme”, permettent d’enregistrer les défauts du chemin optique complet: poussières sur l’objectif et/ou le(s) miroir(s), poussières sur les filtres, sur le capteur, vignettage de l’objectif. Comme ces défauts évoluent très rapidement dans le temps, il est nécessaire de les créer à chaque session de photo; les flats sont donc liés à la température du capteur, au chemin optique, aux filtres utilisés et à la date des photos. L’orientation de la caméra est également un facteur essentiel, car les défauts de l’instrument se reflètent à un endroit spécifique sur la surface du capteur; une rotation de la caméra dans le porte oculaire entraînera la prise de nouveaux FLATS. Comme pour les deux précédent types d’images, on créé un MasterFLAT, par filtre utilisé. Par exemple, pour des captures d’un objet en LRGB, si 4 filtres sont utilisés, il faut faire 4 séries de flats, une par filtre. La durée de validité d’un flat est donc réduite à la durée pendant laquelle le train optique et les conditions de prise de vue ne changent pas.
- Les LIGHTS : il s’agit des images de l’objet que l’on photographie. Comme pour les FLATS, il faut enregistrer la température de capture, le temps de pose, le filtre utilisé, l’orientation de la caméra dans le porte-oculaire, la date de capture.
L’étalonnage des images est expliqué dans cet article.
On se rend donc compte que pour traiter une image (un “light”) on a besoin :
- du MasterDARK correspondant
- du MasterFLAT correspondant
Au bout de quelques sessions, il devient vite important de s’organiser pour ne pas s’y perdre dans la multitude de fichiers engendrés.
Dès lors, comment organiser tous ces fichiers ?
Voilà ma méthode.
Pour les BIAS:
Je créé tous les fichiers BIAS en enregistrant la date, le nom de la caméra, le temps de pose, le gain et l’offset dans le nom du fichier.
Je créée un répertoire nommé d’après la date et le nom de la caméra, dans lequel j’entrepose tous les BIAS correspondants
Je crée le MasterBIAS que je nomme d’après la date et le nom de la caméra, que je range dans un répertoire dédié aux “masters” d’étalonnage.
Exemple de noms de dossiers/fichiers MASTER BIAS:
Pour les DARKS:
Exactement comme pour les BIAS, en y rajoutant l’information du temps de pose et la température. Donc, les noms des fichiers DARK et MasterDARK contiennent la date, le nom de la caméra, la température, le temps de pose, le gain et l’offset.
Ils sont rangés dans le répertoire dédié aux “masters” d’étalonnage.
Exemple de noms de dossiers/fichiers MASTER DARKs:
Pour les FLATS:
Même taxonomie que pour les DARKs, en y rajoutant le nom de l’instrument, le nom du filtre et l’orientation de la caméra dans le porte oculaire.
Exemple de fichiers FLATs:
Je crée un répertoire nommé de la même manière, en indiquant dans son nom “MasterFLAT” pour le retrouver facilement.
Exemple de noms de dossiers/fichiers MASTER FLAT:
Pour les LIGHTS:
Même taxonomie que pour les FLATS, en y rajoutant le nom de l’objet capturé.
Exemple de fichiers LIGHT:
Comment utiliser tous ces fichiers en pratique?
Lorsque l’on traite les images capturées, il faut d’abord les étalonner, donc récupérer les MasterDARK et MasterFLAT par filtre correspondants.
Les MasterDARK ne dépendent pas du train optique utilisé, ils peuvent être réutilisés pendant une longue période, poourvu qu’ils aient les mêmes caractéristiques que les images à étalonner: caméra, température, temps de pose, gain, offset.
Concernant les MasterFLAT, une difficulté se présente : il faut utiliser les flats qui correspondent aux lights, c’est-à-dire utilisant le même train optique et les mêmes caractéristiques (hormis le temps de pose):
- Une solution pratique peut être de recopier les MasterFLATS correspondants dans le même répertoire que les lights capturés, ce qui permet de les retrouver immédiatement sans devoir les rechercher lors d’un traitement ultérieur.
- Une autre solution peut consister en la tenue d’un journal de sessions, dans un fichier Excel par exemple, où l’on indique pour chaque session de light, le nom du répertoire des fichiers de MasterFLATS correspondant.
- Enfin, et c’est l’objet d’un autre article, on peut utiliser un logiciel de base de données relationnel multiplateforme qui permettra de gérer l’association LIGHT/FLAT très simplement – mais cela demande des connaissances informatiques avancées.
Exemple de noms de dossiers/fichiers MASTER LIGHT: